Mépris sans borne, tous azimuts

La stupéfiante campagne pour la présidence de l’UMP touche à sa fin. Il était temps de mettre un terme à cette parodie de démocratie.

On a entendu d’un côté Hervé Mariton plaider pour la promotion d’une politique ultra libérale, de type anglo-saxon, dont personne ne veut en France, pas plus qu’à l’UMP (il est regrettable que cet homme pondéré, clair, précis, et somme toute fort sympathique, campe sur des principes tellement éloignés de ceux que les Français souhaitent voir triompher) ; il loupe sa cible mais sa campagne reste honorable par le ton, et par la manifeste honnêteté de ses prises de position ; Bruno Le Maire, sans illusion sur son score, a défendu, avec constance et conviction, des points de vue qu’on peut contester (surtout quand on se revendique de la gauche), mais qui ne sont pas foncièrement absurdes ; on se prendrait même à regretter que les idées de ce candidat restent minoritaires parmi les militants de l’UMP ; Nicolas Sarkozy, l’homme aux visages multiples, le spécialiste de l’inconstance et de l’outrance, s’est complu, comme à son habitude, dans les prises de position « clivantes » pour reprendre l’expression favorite des commentateurs politiques et des journalistes… et c’est évidemment là que rien ne va plus, et qu’on peut se demander ce qui subsistera de la démocratie après que l’ancien président de la République aura achevé son tour de manège préélectoral.

Ce n’est pas sans stupéfaction, sans effarement, qu’on a dû écouter les commentaires qui ont accompagné la campagne de celui qu’on considère dans les medias en général, et il faut prendre cette qualification comme un compliment, voire une marque d’admiration… pour celui qui est considéré comme un « animal politique ».

Et qu’est-ce qui est censé justifier ce titre prestigieux entre tous (si on en croit l’admiration extasiée que manifestent ceux qui utilisent cette expression) ? Les analystes de la politique française n’en font aucun mystère ; ils utilisent disent-ils eux-mêmes, cette formule de glorification, parce qu’ils estiment que cet homme, si habile, qui est présentement en campagne pour la présidence de l’UMP, dit à ses auditoires, qui par ailleurs lui sont tout acquis a priori, « ce qu’ils veulent entendre »… qui n’est évidemment pas ce que ce génie de la politique pense (s’il pense quelque chose ; à les en croire, ce serait encore tellement plus admirable s’il ne pensait rien !)… qui n’est pas non plus ce qu’il dira aux électeurs de la primaire qui sera organisée en vue de la désignation du candidat de la droite à la future présidentielle (étant entendu que le discours devra varier selon que la primaire sera ouverte ou fermée ; si primaire il doit y avoir ; si avec sa diabolique habileté il n’est pas parvenu à imposer sa candidature d’office à la présidence de la République) ; et qui, enfin, n’est pas, cela va de soi, ce qu’il dira aux Français s’il parvient à s’imposer d’une façon ou d’une autre comme candidat de la droite à la présidentielle…

Comme cela, en effet, est admirable ! Et d’une ferveur démocratique des plus raffinées !

Je n’exagère en rien ; tout un chacun, qui s’intéresse un tant soit peu à la politique française, a pu entendre les commentateurs les plus respectables s’exprimer comme indiqué ci-dessus ; jusqu’à Denis Jeambar, commentateur modéré, posé jusqu’à la réserve, qui n’hésite pas à répéter à qui veut bien l’entendre que Nicolas Sarkozy parle pour l’instant aux militants de l’UMP et que, une fois élu président de ladite formation, il changera totalement ses formules, s’adressant alors à son futur électorat, du moins à l’électorat qui deviendra sa cible s’il devait représenter la droite à la présidentielle de 2017.

La démocratie se meurt ; à moins qu’elle n’ait jamais vécu.

Est-il possible que le peuple français soit la dupe de ces funambules, de ces méprisables sophistes, qui ne sont que des apprentis sorciers, sans foi ni loi, qui font de la politique comme on joue au poker dans les « tripots » les plus mal famés ?