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La foi en l’efficacité inépuisable du raisonnement rationnel, et en sa capacité d’éclairer, entre autres, aussi bien l’être que l’agir humains, est elle autre chose qu’une croyance ; ou est-elle analogue à la croyance en l’existence d’un Dieu créateur,  puissance tutélaire de la pensée des hommes ?

Autre formulation de cette même problématique : à quel type de vérité la raison est-elle en mesure de donner accès ? Et, avant tout, comment pourrions nous en juger ?

Finalement que savons nous des pouvoirs de la raison ? Et, peut-être, plus fondamentalement, en quoi consiste-t-elle ?

On dit de la raison qu’elle est le pouvoir de distinguer le vrai du faux ; performance qu’elle réaliserait en tant qu’elle serait la faculté des principes. C’est laisser entendre, et c’est bien ainsi que tout le monde le comprend, sans l’avoir le moins du monde vérifié, que la raison est une faculté innée ; que le cerveau humain dispose, donc, d’une batterie de principes a priori (cf. K.E.Kant et sa « Critique de la raison pure »), qu’il saurait manipuler avant toute expérimentation, et qui le mettraient en situation de s’approprier le monde ; savoir, déceler sa cohérence, éclairer ses agencements par le menu, découvrir sa prévisibilité, en un mot, le comprendre. C’est affirmer, du moins le faire implicitement, que le monde (entendez le réel dans sa totalité, la réalité physique) s’articule selon ces mêmes principes ; qu’il les respecte.

On cite parmi les grands principes premiers, qui sont censés fournir à l’homme les clés du réel, entre autres, les principes d’identité, de contradiction…mais aussi, et surtout, les principes de causalité et de finalité, dont l’expression synthétique est le principe de raison ; lequel, en quelque sorte, exprimerait le mode d’être du monde, son mode d’exister et de se manifester, d’écrire sa propre histoire ; si bien qu’on prétend avoir compris un événement, une chose quelconque, quand on a élucidé sa raison d’être ; autrement dit, quand on a déterminé sa cause, et révélé sa finalité.

Si on fait sienne cette architecture du monde, on voit bien que l’existence d’une divinité s’impose comme devant jouer le rôle de la pierre d’angle, sans laquelle l’ensemble de l’édifice menace de s’effondrer ; il faut, en effet, à toutes ces causes qui agissent, en cascade, les unes sur les autres, conférant au monde sa structure, une première cause capable de les ébranler toutes, qui soit cause d’elle-même ; à défaut le raisonnement s’enliserait dans les sables mouvants d’une régression à l’infini ; et il faut, également, une finalité, capable d’animer, de fournir une détermination à la cause première… c’est le Dieu créateur ; l’objet d’une croyance purement spéculative, non susceptible de faire l’objet d’une vérification, dont la première détermination réside dans son entière soumission à la raison (Leibniz le voit ainsi), ou, ce qui revient au même, sa maîtrise parfaite, de la raison.

Finalement, la raison, ainsi décrite, s’entend comme la faculté, innée chez l’homme, (que ce dernier partage avec Dieu, mais à un moindre niveau d’efficacité), qui lui permet, sinon de maîtriser pleinement, du moins d’utiliser efficacement, le monde physique, parce que celui-ci a été créé, par Dieu, à l’aide des lois qui, précisément, régissent la raison (et auxquels certains ont convenu, et fait admettre à tous, ou presque, que Dieu lui-même ne peut que se soumettre), et en conformité avec elles.

Enlevez Dieu ; conservez tous les attributs qu’on vient d’attribuer à la raison humaine ; vous obtenez la science contemporaine, qui court, désespérément, après la cause première, sans, bien sûr, jamais l’atteindre, ni même l’entrevoir ; qui a inventé le big-bang comme étape cosmologique, investissant une explosion initiale, à partir de presque rien, du rôle de génitrice du monde physique dans lequel nous vivons…

Si Dieu peut, et doit, être qualifié de pure croyance, la raison que nous propose la science prétendument sans Dieu, n’est, en fait, qu’un avatar de Dieu ; quant à la cosmogonie qui fait intervenir cette supposée formidable explosion primordiale, elle est à ranger sur la même étagère que celle sur laquelle ont été remisées toutes les cosmogonies mythiques qui l’ont précédée. (A suivre)

 

[Louis R. Omert est l’auteur de l’ouvrage intitulé « Le sursaut », « Essai critique, social et philosophique », publié chez l’Harmattan, dans la collection « Questions contemporaines »]

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