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Pour quelqu’un qui a été élevé, et éduqué, dans un contexte, une ambiance, et selon des préceptes, et des perspectives, chrétiennes, et encore plus s’il a été soumis à une influence, sincèrement, et donc inconditionnellement, catholique, lire les Evangiles avec un esprit crique (si peu que ce soit) est une entreprise quasiment hors de portée ; et c’est bien dommage pour lui ; il a du subir, tout au long de sa vie, l’écoute d’une multitude d’homélies dominicales, plus ou moins insipides, qui ont présenté ces textes sous un jour convenu, sans la moindre couleur, comme irréel.

Au non chrétien, voire à l’agnostique, qui souhaiterait comprendre de quoi Jésus voulait parler quand il faisait allusion au monde, on peut signaler qu’on trouve chez Jean l’évangéliste de nombreux discours de Jésus qui se réfèrent à cette notion ambiguë, entretenue comme telle par les milieux ecclésiastiques ; on verra qu’en réalité ce concept de monde n’est obscurs que pour ceux qui ne veulent pas l’entendre. Qu’on en juge !

En 17(6.15), Jean prête à Jésus cette prière à propos de ses disciples :  « Père… j’ai fait connaître ton nom aux hommes que tu m’as donnés du milieu du monde… je ne prie pas pour le monde, mais pour ceux que tu m’as donnés, car ils sont à toi… aucun d’eux ne s’est perdu… je ne te prie pas de les ôter du monde, mais de les préserver du mal ». On voit ici que le monde n’est pas l’univers ; qu’il n’est pas non plus constitué de tous les hommes, mais d’une partie d’entre eux ; de ceux dont il est dit en 12(25) : « Celui qui aime sa vie la perdra, et celui qui hait sa vie dans le monde la conservera pour la vie éternelle » ; on comprend bien que ceux qui sont ici condamnés sont ceux qui aiment la vie du monde, leur vie dans le monde tel que les hommes l’ont façonné, tel qu’il était du temps de Jésus, tel qu’il est toujours ; et Jésus précise sa pensée, en 12(41), quand, parlant des chefs des prêtres qui crurent en lui mais n’en firent pas l’aveu, à cause des pharisiens, par crainte d’être exclus de la Synagogue, il déclare : « Ils aimèrent la gloire des hommes plus que la gloire de Dieu » ; Et tout aura été dit quand il aura ajouté 12(31) : «Maintenant a lieu le jugement de ce monde, maintenant le prince de ce monde sera jeté dehors ». C’est pourquoi en 15(19), Jésus a pu dire à ses disciples : « Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui est à lui ; mais parce que vous n’êtes pas du monde, et que je vous ai choisis du milieu du monde, à cause de cela le monde vous hait ». Encore plus précise, si nécessaire, en 8(23) on trouve cette formule, limpide, destinée aux pharisiens : « Vous êtes d’en bas, mois je suis d’en haut ; vous êtes de ce monde, moi je ne suis pas de ce monde ; c’est pourquoi je vous ai dit vous mourrez dans vos péchés ».

Le monde, selon Jésus, qualifié, selon le cas, de « ce » monde, est constitué de ceux qui, ici-bas, s’obstinent à imposer le choix (la loi) des hommes, c’est le monde créé par les hommes d’en bas, qui se revendiquent de la chair, au mépris de celui de Dieu, celui des hommes qui sont d’en haut, des hommes qui se revendiquent de l’esprit  ; et ceux-là, les hommes d’en bas, sont, sans la moindre équivoque, condamnés comme étant au service de Satan ; le monde des hommes d’en bas, monde du mal, est un monde démoniaque. Et quand, répondant à Pilate qui lui a demandé, en 18(33) : « es-tu le roi des Juifs ? », Jésus s’exclame en 18(36) ; « Mon royaume n’est pas de ce monde », clairement il ne veut pas dire que son royaume, le royaume de Dieu, est dans l’au-delà, par delà le temps, au ciel ou dans les cieux (selon une expression qui avait un sens parfaitement évocateur dans l’antiquité, mais qui, aujourd’hui, n’a plus aucun sens, et fait partie du vocabulaire d’une mythologie infantilisante et abêtissante à laquelle l’Eglise ferait bien de renoncer) ; ce n’est pas une entité purement métaphysique ; le royaume de Jésus, tout simplement, n’est pas du monde auquel Pilate et les pharisiens appartiennent, ce monde des hommes d’en bas, mais il est à venir sur cette terre pour les hommes d’en haut. La prière que Jésus a enseignée à ses disciples le dit, d’ailleurs, sans ambages : « Notre père qui es au cieux, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel… ».

[Louis R. Omert est l’auteur de l’ouvrage intitulé « Le sursaut », « Essai critique, social et philosophique », publié chez l’Harmattan, dans la collection « Questions contemporaines »]

 

 

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