Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Elle n’a vécu que cinq ans ; enfant martyre, sa dépouille a été jetée dans une forêt ; ceux qui ont réalisé, clandestinement, hâtivement, son ensevelissement sommaire, ne savent même plus retrouver le lieu de sa sépulture ; on ne connaît pas les conditions exactes de son décès ; on ne sait pas ce qui a causé son décès, ni à qui, de sa maman ou de son beau-père, en incombe la responsabilité… si responsabilité directe, donc culpabilité, il y a… même si tout laisse penser qu’il s’agit d’une mort provoquée, accidentellement ou non.

Ce qu’on sait, en revanche avec certitude, c’est que la maman de Fiona, et son beau-père (ou celui qui en faisait office), se sont ingéniés, avec un certain succès, à accréditer l’idée d’une disparition ; que sur la foi de leurs déclarations, d’importantes recherches ont dû être entreprises… un comité de soutien s’était même constitué pour épauler le couple éploré… et voilà qu’on apprend que tout n’a été que mise en scène ; que la maman de Fiona, et son compagnon, savaient, depuis le début, que l’enfant n’était plus.

Alors les médias se font l’écho des réactions indignées de tous ceux qui se sont intéressés au sort de Fiona, et en particulier de ceux qui généreusement ont pris part au comité de soutien ; on entend l’une s’offusquer : « Comment une maman peut-elle choisir son amant plutôt que son enfant ? » ; on aura compris que pour celle-ci la culpabilité du compagnon de la maman ne fait aucun doute ; on entend cet autre, indécis quant à la désignation du coupable, exprimer son effroi : « Lequel est-il le monstre ? » ; on entend encore cette condamnation sans appel : « Mais comment expliquer l’inexplicable ? » ; on voit ces images télévisuelles, effrayantes, d’un petit groupe d’excités qui vocifèrent leur haine au passage des présumés coupables, mis en examen.

La mort prématurée de l’enfant innocent déchaîne les passions… alors qu’elle ne devrait faire naître que de la compassion.

Compassion pour cette pauvre enfant, douloureuse victime d’on ne sait encore trop quoi ; mais dont on soupçonne qu’elle a succombé aux assauts concertés de l’inculture, de l’ignorance et, vraisemblablement, de la drogue ;

Compassion pour cette maman qui a perdu son enfant, ce qui est, en soi, et bien en tendu pour elle…qui oserait en douter ?… une tragédie, quand bien même elle serait coupable, ou complice, de cette mort, par action, ou par omission ;

Compassion pour le compagnon de cette maman dont personne ne peut imaginer, si par ailleurs il devait être reconnu comme étant le vrai coupable, qu’il ait pu délibérément vouloir provoquer la mort de Fiona.

Devant un tel drame ; devant tant de malheur accumulé, faisons d’abord silence ! Associons nous, ne serait-ce que quelques instants, aux souffrances éventuelles de l’enfant, à l’injustice de son sort, à la douleur de la mère, à l’effroi de tous les acteurs mêlés à cette tragédie, que se soit de leur plein gré, ou malgré eux… et essayons de comprendre, car rien de ce qui est humain, rien de ce qui procède de l’humanité, n’est inexplicable…

Si je m’autorise à joindre ma voix au concert assourdissant qui accompagne, depuis plusieurs jours déjà, cet effroyable fait divers, ce n’est pas pour m’associer, on l’aura déjà compris, aux condamnations, avant jugement, des coupables supposés ; ce n’est pas non plus pour provoquer une quelconque réprobation à l’encontre de ceux qui jugent sans savoir ; c’est parce qu’un événement s’est produit dans ces circonstances plus que simplement regrettables, événement qui mérite d’être souligné : on a appris, par la presse écrite, que la maman de Fiona était enceinte d’un troisième enfant au moment des faits ; on a également appris, que les enquêteurs seraient assez tôt parvenus à la conviction que cette dernière mentait quand elle prétendait que sa fille avait disparu à son insu, et qu’elle devait être, au contraire, directement, impliquée dans cette disparition, mais qu’ils auraient décidé d’attendre qu’elle accouche avant de faire état de leurs soupçons, et de leur donner la suite qui s’imposait… si tel est le cas, et rien ne permet d’en douter, alors c’est que quelque chose d’important c’est produit au milieu de cet océan de misère déchaîné ; quelque chose qui montre à l’évidence qu’il n’y a pas lieu de désespérer de l’humanité.

[Louis R. Omert est l’auteur de l’ouvrage intitulé « Le sursaut », « Essai critique, social et philosophique », publié chez l’Harmattan, dans la collection « Questions contemporaines »]

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :