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Certains (leur nombre va croissant) sont en train de prendre conscience que si la France veut vraiment sauver son modèle, alors il est temps que les partis de gouvernement déposent les armes, rangent l’invective, et toutes autres formes de violence verbale, au placard, pour se consacrer activement à la recherche des termes d’un accord de gouvernement ; la France est dans l’attente d’une grande coalition politique associant la gauche et la droite.

Et tout d’abord essayons de déterminer en quoi consiste ce modèle français qui devrait être préservé.

Il est social, économique et politique, bien sûr, mais pas seulement ; il s’exprime aussi, et c’est peut-être même là son trait le plus spécifique, il s’exprime dans les mœurs ; en somme il s’agit d’une culture ; et cette culture est tellement originale qu’on peut poser la question de savoir si elle ne constitue pas, à proprement parler, une civilisation à part entière.

Ce modèle, il faut le dire, est plus dans la tête des Français que dans les institutions dont ils se sont dotés (démocratiquement, paraît-il) ; plus, également, dans l’esprit de cette marée d’anonymes, qui sont la chair et le sang de la nation, et desquels, il ne faut pas hésiter à l’affirmer haut et fort, procède son âme, que dans l’esprit de son élite. Pour une raison très simple : le Français lambda, quand il n’est pas le rejeton d’une famille paysanne, est le descendant d’une famille d’immigrés ; dans l’un et l’autre cas, s’il n’a pas été dévoyé par la compétition et le formatage destiné à faire de lui, en principe, un membre à part entière d’une élite, monolithique, idéologiquement déterminée, il tient de sa culture familiale un besoin ardent d’autonomie, d’indépendance, qu’on confond trop souvent avec de l’individualisme, et qui n’est qu’une aspiration à la liberté (chaque Français est un soldat de Valmy) . Ce Français, est volontiers frondeur ; il soumet à la critique toutes les formes de pouvoir (dont l’élite s’ingénie à le rendre prisonnier) ; il se complet à tourner en dérision ceux qui passent pour être les puissants de ce monde ; même, et surtout, quand ils tiennent de lui leur (pseudo) légitimité ; il a puisé dans la sublime culture nationale (qui n’est pas celle enseignée dans les école supérieures destinées à l’embrigadement de l’élite) un puissant idéal de fraternité ; il croit en l’égalité ; chaque Français, tout bonnement parce qu’il est français, se sent investi d’une mission de défense des droits de l’homme.

Les institutions politiques et sociales que l’élite a conçues pour le compte du peuple français n’ont pas pu ignorer, du moins pas totalement, cette lame de fond idéologique qui anime en permanence ce peuple et parfois l’ébranle, le soulève, et le porte aux actes de bravoure, et jusqu’à l’héroïsme le plus grand et le plus désintéressé. Les Français depuis 1789 ont entrepris de gravir avec obstination les pentes ardues qui conduisent vers plus de générosité, plus d’humanité ; ils vivent aujourd’hui sous un régime, un modèle, conçu de façon consensuelle, alors que le pays était occupé par les armées étrangères et qu’un gouvernement fantoche, sans aucune assise démocratique, s’évertuait à le rendre docile aux caprices de l’envahisseur ; c’est dans l’adversité qu’a été conçu leur système de sécurité sociale extrêmement astucieux, largement redistributeur, et qui leur sert de bouclier contre les crises économiques (il vient une fois de plus d’en administrer la preuve à l’occasion de la crise financière de 2008) ; les Français y sont attachés ; et aucun homme politique, sur quelque bord de l’échiquier politique qu’il se situe, ne peut s’imaginer pouvoir mettre en œuvre une politique nationale, quelles qu’en soient les motivations, qui aurait la prétention ne pas respecter le pacte social de la nation : le rétablissement de la compétitivité de l’économie nationale ne se fera pas au prix de ce pacte.

Il s’avère donc qu’il est impérieusement nécessaire, aussi bien pour la droite que pour la gauche, de sauver le modèle social du pays ; cette obligation s’impose de fait à tous les partis républicains ; seul un dictateur qui parviendrait à s’en donner les moyens -vous voyez de quoi il est ici question ; et combien une telle hypothèse est heureusement improbable- pourrait s’en exonérer. Or à défaut d’un sursaut de l’ensemble du pays, consistant en sacrifices, consentis par tous ceux qui ont la possibilité de les faire ces sacrifices, c’est-à-dire par une grande majorité de la population (débordant largement tous les clivages politiques), il est impensable de parvenir à rétablir les grands équilibres de l’économie française et, partant, sa compétitivité, tout en ne compromettant pas, dans son ampleur et dans sa teneur, le pacte social (en se contentant, simplement, de l’ajuster aux données sociales actuelles).

L’opinion publique, dans ses profondeurs, appelle de ses vœux à l’union (c’est vrai qu’elle le fait souvent avec une désarmante naïveté ; avec l’idée qu’il suffirait de mobiliser les bonnes volontés, et les compétences, de tous les bords, pour que tout aille mieux… malheureusement ce n’est pas aussi simple, car les bonnes volontés sont d’abord au service de leurs propres intérêts… et c’est précisément, parce que, aujourd’hui, il y va de l’intérêt de toutes les composantes de la société, que l’entente est devenue possible, et doit être considérée comme une impérieuse nécessité) : malheur à qui rendrait le compromis impossible ! (A suivre)

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