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Sigmund Freud a révélé l’existence d’un inconscient ; cette découverte majeure d’une activité cérébrale clandestine, capable de déterminer les sensations, et l’agir, du sujet sans que ce dernier perçoive lui-même, clairement, l’origine des sentiments dont il est le siège, ou les motifs de son action ; sans qu’il parvienne à déceler la nature d’une motivation qui reste confuse, et qui l’incite néanmoins à agir, à ressentir, à sentir ; motivation qu’il éprouve, le plus souvent, comme particulièrement exigeante… cette découverte a été, au début des temps, considérée comme devant permettre d’expliquer certains troubles de la conscience, d’origine pulsionnelle.

Dans la droite ligne de la philosophie des deux substances, on a alors considéré que l’activité inconsciente était imputable au corps ; qu’elle ne pouvait que troubler la pureté, la transparence, de l’esprit.

On n’en est plus là ; il n’est pas même certain que Freud en soit resté à cet interprétation de sa découverte, stupéfiante pour l’époque : le sujet n’a pas la maîtrise totale de son psychisme ; son esprit peut être visité, perturbé, violé, par des fantômes ; savoir, par des produits spontanés de son organisme : réactions émotionnelles, sensorielles, pulsionnelles, en relation plus spécialement avec sa sexualité ou, plus généralement, avec sa libido, avec le désir au sens le plus large.

Aujourd’hui on refuse (à juste titre) d’accepter une explication de l’inconscient qui se voudrait topique, quel que soit le sens qu’on veuille donner à ce terme ; on ne croit plus qu’il y ait un lieu dans le cerveau inaccessible à la conscience ; encore moins que cette dernière soit située en un lieu particulier du cerveau ; on n’imagine pas plus que l’activité inconsciente du cerveau réponde à des principes de fonctionnement différents de ceux qui aboutissent au surgissement d’une représentation, consciente par définition ; on pense plutôt que les phénomènes inconscients ont à voir avec la conscience ; qu’ils participent du processus même qui rend le sujet conscient de son environnement et de lui-même ; néanmoins, on dispute encore sur le point de savoir si cette activité, dite inconsciente, est maintenue dans la clandestinité, parce qu’elle y serait reléguée par le cerveau lui-même dans le but de protéger le sujet contre les agressions jugées déstabilisantes (cerveau… qu’on investit alors d’un pouvoir d’appréciation de l’opportunité de laisser émerger, sous formes conscientes, certaines informations qu’il jugerait dangereuses, menaçantes, pour l’équilibre du sujet, pour le maintien de sa nécessaire sérénité) ; ou si, tout simplement, elle ne parvient pas à s’exprimer au niveau conscient, soit, et c’est probablement le cas le plus courant, parce qu’il lui manque les mots pour le faire, parce qu’il s’agit de sensations enregistrées par le cerveau à un stade préverbal, soit parce l’attention du sujet se porte sur un point de fixation tout autre que celui qui a provoqué l’enregistrement desdites sensations ; point de fixation qui entretient néanmoins un rapport de similitude, de proximité… avec l’évènement originaire justifiant la réactivation des sensations qui lui avaient été associées.

Imaginer l’existence d’une routine dans les neurones du cerveau, autonome (détachée de la conscience), dotée d’un pouvoir d’appréciation de l’opportunité d’écarter les idées (concepts, impressions, sensations, émotions… etc.) perturbantes pour le sujet, comporte deux inconvénients, qui paraissent être des objections rédhibitoires : le premier inconvénient procède d’une question, condamnée à rester nécessairement sans réponse ; question qui demande à déterminer par le fait de quelle inconséquence le cerveau se trouverait investi, par la nature, du pouvoir d’effacer ce qui y a été inscrit, précisément, par la nature (peut-on y voir autre chose que la main de Dieu ?) ; le second consiste en la prise de conscience qu’un tel phénomène, si son existence était avérée, enlèverait au prétendu sujet toute chance de parvenir à une forme quelconque de liberté ; autant il paraît évident qu’il faille soutenir que l’être humain n’est pas un sujet libre par essence ; autant il est insupportable de devoir imaginer que l’accession à l’humanité, qui comporte obligatoirement l’exercice d’une forme de liberté, puisse n’être que le résultat d’un processus purement automatique, étroitement contrôlé par les lois rigides de la nature. La notion de refoulement, si elle est conçue comme le résultat d’une action du cerveau sur lui-même, interdisant à certains phénomènes mémorisés de parvenir jusqu’au niveau du conscient, est absurde, sans fondement, hors de toute justification rationnelle.

En revanche, on peut imaginer (et en fournir quelque explication), que ce qui a été qualifié d’inconscient est constitué par l’arsenal de tout ce qui va être mis en œuvre, exploité, par le cerveau, pour fournir au sujet une représentation consciente ; savoir tout ce qui a été enregistré précédemment par lui, de façon plus ou moins claire, suivant que l’enregistrement remonte à une période pré ou post-verbale, et qui sera automatiquement mobilisé pour documenter l’évènement (au sens le plus large du terme) que les circonstances proposent à son analyse ; ce capital,  prétendument inconscient, n’est rien de plus, ni rien de moins, que le matériel à partir duquel se construit toute perception.        

 

 

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