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Dans le numéro du 18 avril du journal « Le Monde », le philosophe ( ?) Michel Onfray  s’autorise à signer une virulente diatribe contre les dix candidats à la campagne présidentielle, n’en épargnant aucun, les accusant tous de privilégier les passions tristes, sans pour autant, à aucun moment, éclairer le lecteur sur ce que pourraient bien être, en fait les passions joyeuses, celles  dont il assure qu’elles « augmentent la puissance d’exister », qu’elles « créent, assemblent et rassemblent, fédèrent » ; qu’elles se retrouvent « dans la politique citoyenne » ; avouez qu’on ne peut être plus vague, plus imprécis ! Sans doute M. Onfray considère-t-il l’ésotérisme comme une pratique s’imposant à qui prétend revendiquer une posture  philosophique. Et pour conclure ce discours sibyllin, une recommandation d’une haute tenue citoyenne : ne pas voter ; ou, pour ceux qui le préférerait, voter blanc ;  suivie d’une formule absconse ; « Jamais je n’ai eu autant l’impression que Pierre-Joseph Proudhon était d’actualité ». S’agit-il d’une profession de foi ? Si tel était le cas, pourquoi ne l’avoir pas fait entendre plus clairement ? Par quelle aspérité de sa  multiple et généreuse pensée,  Pierre-Joseph Proudhon serait-il devenu, ou redevenu d’actualité ? Ce qui, a priori, n’est aucunement aberrant. Mais, M. Onfray songe-t-il au Proudhon partisan d’une  anarchie qualifiée de positive ? A moins que ce ne soit au révolutionnaire pacifiste ? Ou, peut-être, à l’économiste adepte d’une démocratie économique mutualiste, et d’un fédéralisme autogestionnaire ? Au polémiste ? Au défenseur d’un socialisme scientifique ? La formule de M. Onfray doit-elle être comprise comme signifiant que, face à une classe politique qu’il juge inconséquente (et on ne peut exclure que ce jugement soit en grande partie justifié), la seule attitude, conséquente pour le citoyen, consiste à se retirer sur l’Aventin, à se recroqueviller dans son individualisme, car il est exact que P. J. Proudhon fut, également, un individualiste convaincu ? Mystère !

Quoiqu’il en soit (tout en n’excluant pas, d’aileurs, que l’auteur du présent blog n’ait pas été en mesure de saisir la pensée, peut-être trop subtile et trop profonde, de M. Onfray), un point reste acquis :  ce n’est pas en offrant, dans un quotidien à la mode (mais pour combien de temps encore ?), à la lecture d’un large public qui se croit cultivé, quelques pirouettes qui se veulent littéraires, et qui ne se signalent que par leur vacuité abyssale, que le philosophe peut s’acquitter de la mission qui lui incombe dans la société. Au lieu de faire de l’esprit à bon compte,  sans prendre le moindre risque, en s’adonnant à une critique systématique, ayant de forts relents de populisme, M. Onfray aurait mieux fait de préciser (puisqu’il a l’air de le savoir), comment s’extirper du piège terrifiant  dans lequel un capitalisme financiarisé,  dé-régularisé, et mondialisé, a fait choir l’Occident.

[Louis R. Omert est l’auteur de l’ouvrage intitulé « Le sursaut », « Essai critique, social et philosophique », publié chez l’Harmattan, dans la collection « Questions contemporaines »]

  

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